chapitre 1 + « Notre fils s'appellera Matty John Aindreis. » Déclarait une magnifique femme blonde aux yeux bleu à la sage-femme, tout en regardant le bébé posé dans ses bras. Un petit bout qui venait tout juste de naître. A côté d'elle, un jeune homme brun aux yeux vert l'a regardé avec attendrissement. On pouvait lire le bonheur sur leur visage. Ce bébé, le petit être qui avait déjà une belle poignée de cheveux châtain sur la tête et qui avait toujours les yeux fermés, c'était moi. J'ai vu le jour le premier mai de l'année mille neuf cents quatre-vingt-onze à Leeds. J'étais le fruit de l'union d'une charmante femme âgée de vingt-quatre ans et d'un magnifique jeune homme âgé tout juste de vingt-six ans. Ma mère était décoratrice d'intérieur, tandis que mon père, lui, était dans les affaires. Autant dire qu'à ma naissance, j'aurai pu faire envier n'importe qui, vu ma situation familiale qui était plus que confortable. De plus, mes parents s'aimaient à la folie. Ils s'étaient rencontrés six ans auparavant, à l'arrivée de ma mère dans l'université que mon père fréquentait. Ils s'étaient plu tout de suite et au bout de quatre ans de relation, ils s'étaient mariés. Deux ans après leur mariage, j'avais pointé le bout de mon nez, chose qui ne faisait qu'accroître leur bonheur. Les deux premières années de ma vie étaient passées de la manière la plus parfaite possible pour un bébé. Les photos de famille pouvaient en témoigner encore à l'heure actuelle. On était tous les trois heureux, le sourire pratiquement toujours sur les lèvres. Mais, par la suite, les choses ont un peu changés. Même beaucoup. L'entreprise où mon père travaillait avait connu de grosses pertes et, après des mois à se battre, elle avait fini par fermer, faisant perdre son travail à mon père. J'imagine que cela avait un coup dur pour lui, puisqu'à partir de ce moment-là, il s'est mis à boire dans des bars. Au début, c'était juste un ou deux verres pour se remonter le moral, mais ensuite, il n'y avait plus un seul soir où il ne rentrait pas complètement saoul. Ma mère avait de plus en plus de mal à le supporter. Elle n'aimait pas le voir se détruire et les disputes ne se faisaient pas rares entre eux. A n'importe quelle heure de la journée. C'est à cette période qu'elle a commencée à me confier à notre voisine, une vieille dame. D'une part, pour que je n'entende plus les disputes et d'autres parts, pour que je ne vois pas mon père s'en prendre physiquement à ma mère. Parce que oui, il avait commencé à la frapper à cette époque-là et, voir ces gestes de violences quand on n'a même pas encore trois ans, c'est plutôt traumatisant. Ma mère voulait me protéger, je le savais, mais ça n'allait pas marcher indéfiniment.
« Il est où ce sale gamin ?! » Pouvais-je entendre depuis ma chambre. J'étais assis sur le sol contre le mur le plus éloigné de la porte, les genoux repliés contre mon torse, les larmes coulant de mes yeux. « Il n'est pas là Matthew. » J'entendais ma mère qui tentait de le convaincre, pourtant, il n'allait pas la croire. Je le savais. Et ça me faisait d'autant plus peur parce qu'il allait s'énerver encore plus. Je serrais de plus en plus mes jambes contre mon torse, me collant le plus possible contre le mur. Des bruits se faisaient entendre dans le salon, sûrement mon père qui s'en prenait une fois de plus à ma mère. Et puis, plus rien. Un silence, pesant qui dura un peu plus de deux minutes, prenait place dans la maison. Jusqu'à ce que j'entende les marches de l'escalier grinçaient. La peur montait un peu plus en moi, me tordant carrément le ventre. J'étais complètement effrayé en fait, pourtant, je me relevais lorsque la porte de ma chambre s'ouvrait à grande volée. Mon père était en face, les yeux rougis par le taux d'alcool qu'il avait pu ingurgiter. Je voyais à son visage qu'il était en colère, contre moi. Je ne savais même pas pourquoi, il ne me l'expliquait jamais. « Te voilà toi ! » Me disait-il et sans que je ne puisse avoir le temps de bouger, il avait déjà fait le nombre de pas qui nous séparait. Je tremblais littéralement rien qu'en le sentant aussi près de moi et, à peine avais-je levé les yeux vers lui, que je sentais comme une brûlure au niveau de la joue. Il venait de me frapper sur ma joue encore toute rondelette avec une violence telle que je me retrouvais projeté sur le côté. Une claque et je me retrouvais complètement sonné, sur le sol. En même temps, je n'avais même pas encore quatre ans et la force de mon père était bien plus élevée que la mienne. Ce soir-là, il m'avait battu, encore une fois depuis que j'avais eu mes trois ans. C'était la seule chose qu'il savait bien faire maintenant .. Et tout ce que je pouvais faire, c'était me roulé en boule sur moi-même afin de me protéger un minimum. Ma vie avait pris un tournant. Elle était passée de merveilleuse à désastreuse et je ne pouvais rien faire pour changer tout ça. Après tout, je n'étais encore qu'un petit garçon sans défense.
chapitre 2 + Ce matin-là, je me réveillais en sursaut dans ma chambre. Des bruits se faisaient entendre depuis le salon et je n'avais pas besoin d'aller voir pour savoir ce qu'il se passait. Mon père et ma mère s'engueulaient, une fois de plus. Je pouvais entendre ma mère reprochait à mon père son alcoolisme ainsi que sa violence, autant vis-à-vis d'elle que vis-à-vis de moi. Et lui, ça l'énervait qu'elle sorte ce genre de propos. Des propos qui lui semblaient idiots. Pourtant, il était devenu un alcoolique et, dans les moments où il avait bu plus que de raison, il devenait le père tyrannique que j'avais appris à découvrir depuis peu. Et à vivre avec aussi. A croire qu'il n'avait pas conscience du mal qu'il nous faisait depuis plus d'un an. Je m'enroulais dans ma couette, plaquant les paumes de mes mains sur mes oreilles pour ne plus entendre leur dispute. Cependant, un cri désespéré ce faisait entendre quelques minutes après. Celui de ma mère. Je sortais de mon lit en vitesse et je courrais jusqu'au salon, pour finalement voir ma mère roulait en boule sur le sol, le bras en sang. Mon père, lui, se tenait debout face à elle, près à lui foutre un coup de pied dans les côtés. « Papa stop ! » Criais-je dans un moment de courage, ou sûrement de folie et d'inconscience en fait. Oui, c'était complètement fou ce que je venais de faire. Qu'est-ce qu'un petit garçon de quatre ans pourrait faire contre son père, fou de colère ? Rien, hormis de se faire tabasser. Dans tous les cas, j'avais attiré son attention sur moi, puisqu'il me regardait à présent, le regard haineux. Rien qu'en voyant son regard, j'avais envie de pleurer. Où était passé ce papa aimant que je connaissais ? J'avais beau n'avoir que quatre ans, je comprenais quand même un minimum de choses. Et l'une d'entre elle était que mon père nous détestait ma mère et moi. Surtout moi. Ce que je ne savais pas, c'était la raison. Je le voyais s'approcher de moi, l'air impassible devant la détresse que pouvait afficher mon visage. Et je me prenais ensuite une baffe avec le revers de sa main. Je sentais sa bague s'incrustait dans ma joue, me laissant une marque que je ne pouvais pas encore voir. Mais, je pouvais la sentir et ça faisait très mal. Je me retrouvais assis sur les fesses, une main sur la joue, le regard levé vers mon père. Je voyais sa main se levait dans le but de me frapper, à nouveau. Automatiquement, je fermais les yeux. « Arrête Matthew ! Je t'en prie ! » Pouvais-je entendre. J'ouvrais les yeux pour voir ma mère, un air plus que désespéré sur le visage, tenant le bras de mon père avec ses deux mains. « Sort mon coeur .. » Avait-elle eu le temps de rajouter, juste avant de se prendre une baffe par mon père. J'ouvrais grand les yeux et, lorsque mon père posait de nouveau le regard sur moi, je me levais et courrais le plus vite possible hors de la maison.
« T'es qui toi ? » Questionnais-je la petite fille qui venait de m'ouvrir la porte. Après être sorti de ma maison en courant, je m'étais dirigé automatiquement vers la personne qui allait pouvoir me réconforter : ma voisine. C'était une vieille dame chez qui j'allai dès que je voulais échapper aux coups de mon père. Ou lorsque ma mère me demandait d'y aller. A force de passer du temps chez elle, je l'appelais "mamie" et elle, elle me considérait comme son petit-fils. Je tenais beaucoup à elle. De plus, sa maison était devenue un havre de paix pour moi. Un endroit où je n'avais à craindre personne. Et là, c'était une fille qui venait de m'ouvrir la porte. Une fille blonde, haute comme trois pommes. Je ne la connaissais pas, mais à vue d'oeil, elle devait avoir mon âge. « J'parle pas aux inconnus ! » Me répondait-elle. Je fronçais les sourcils. « Laisse-moi entrer ! » « Non ! » Elle était aussi têtue que moi et ça m'agaçait. Je n'avais pas l'habitude à me faire refuser quelque chose. Ma mère me cédait tout, sûrement dans l'espoir de compenser le mal que me faisait subir mon père. Un espoir vain puisque j'avais toujours aussi mal à chaque fois que je sentais son regard sur moi. Rapidement, j'entrais dans la maison, bousculant la fille en face de moi. « EH ! MOMMY, AU VOLEUR ! » Hurlait la petite blonde alors que j'étais entrée dans la maison. Alors que j'allai répliquer quelque chose pour la faire taire, je voyais une vieille dame arrivait le plus vite possible, dans un état proche de la panique. Du moins, du plus vite qu'elle pouvait faire à cause de son âge. La panique qui se lisait sur son visage disparait bien vite lorsqu'elle voyait ma petite bouille. « Jude, Matty n'est pas un voleur. » « J'croyais moi ! » Lançait la fillette, un air boudeur sur le visage. Par la suite, 'mamie' avait vu ma blessure sur la joue et elle m'avait soignée, tout en expliquant à la petite fille s'appelant Jude qui j'étais exactement. Et c'est ainsi que j'avais fait la connaissance de Jude. Quand j'y repense, je n'aurais jamais pu imaginer qu'on allait devenir les meilleurs amis du monde par la suite elle et moi.
chapitre 3 + « Mais putain, bébé ! C'est lui qui t'as fait ça ?! » La discussion avait commencé comme ça, ce soir-là. Jude se trouvait devant moi, les yeux grands ouverts. Elle luttait pour ne pas hurler comme une cinglée dans la maison de sa grand-mère et, pourtant, ce n'était pas l'envie qui lui manquait. Je me contentais de hocher la tête, dans l'espoir qu'elle passe à autre chose. Mais, avec Jude, c'était perdu d'avance. Je la connaissais par coeur, je savais qu'elle n'allait pas laisser passer ça. « Merde à la fin ! Il a pas l'droit de t'cogner comme ça ! » « C'est bon Jude, c'est que quelques bleus. Ça passera. » Quelques bleus .. Et une côte sûrement fêlée. Je ne comptais plus le nombre de côte que mon père m'avait fêlée à force de me cogner. Au fond, j'y faisais même plus gaffe. C'était triste à dire, mais c'était devenu une putain de routine depuis mes trois ans. Je me levais en ayant mal quelque part à cause de la veille, j'allai en cours avec Jude, je faisais le con toute la journée avec elle, puis je passais du temps chez sa grand-mère et enfin, je rentrais chez moi, histoire de finir une belle journée sous les coups de mon père. Je ne me plaignais pas, j'avais appris à vivre avec au fil du temps. Mais ma meilleure amie, elle, elle n'en pouvait plus de me voir souffrir comme ça sans bouger un seul petit doigt. Alors, je ne sais pas si c'était sa folie qui l'avait fait se bouger le cul jusqu'à chez moi ou bien encore, son envie de me voir me révolter pour la première fois, mais elle était allée chez moi. Seul. Sans me le dire. C'était sa grand-mère qui m'avait annoncé qu'elle y était allée pendant que je prenais une douche rapide. Je courrais donc jusqu'à chez moi et je ne mettais pas longtemps à comprendre la situation. « J'VOUS INTERDIS DE LE TOUCHER ENCORE UNE .. » « TA GUEULE ! » Et vlan ! Mon père avait foutu une baffe magistrale à Jude, à ma meilleure amie. A ma Jude. Et c'était sûrement le déclic pour moi. Ce soir-là, je me suis rué sur lui et je lui ai asséné un coup de poing en plein dans la face. Toutes ses années à me taire, à le laisser me faire du mal sans rien dire, toutes ses années étaient remontées dans ma mémoire à l'instant où sa main avait touché la joue de ma meilleure amie. « TU LA TOUCHES ENCORE UNE FOIS ET J'TE TUE ! » Toute ma haine sortait d'un coup, surprenant mon père, ainsi que Jude. Avec du recul, je pense qu'elle ne s'attendait pas à une telle réaction de ma part. J'avais été soumis pendant plus de dix ans. Et enfin, je me suis révolté. J'avais entraîné ma mère dans ma rébellion et on avait finalement porté plainte contre mon père.
« CAMPIIIIIIIING ! NOUS FAISONS DU CAMPIIIIING ! CAMPIIIIIIII .. » « MAIS TA GUEULE ! LA TENTE SE MONTERA PAS TOUTE SEULE ! » « BAH S'TU M'AIDAIS UN PEU AUSSI, DU CON ! » J'hochais les épaules, avant de me mettre à rire en voyant ma meilleure amie galérait pour installer la tente. « N'empêche, Mamie elle abuse ! Elle aurait pu nous r'filler sa tente Quechua quand même ! » Parce que ouais, la grand-mère de Jude avait une superbe tente Quechua chez elle, dernier cri, qui se déplie quand tu la jettes dans le vent et qui est prête en deux secondes top chrono. (puuub) Mais non. Nous, on avait eu le droit à la tente toute pourrie, vieille de cinq cents ans et à qui, quand tu mets un pic d'un côté, l'autre côté part en cacahuète. Le truc trop chiant quoi. Tout ça, parce qu'elle avait peur qu'on trou sa jolie tente i-tech ! En plus, ce n'était trop pas notre genre de faire les cons .. Enfin, au final, j'avais quand même donné un coup de main à Jude. La pauvre, elle galérait tellement qu'elle s'était retrouvée affalé sous la tente. Par la suite, je me trouvais devant la tente, à prendre un bain de soleil. « Coucou mon chéri. » Je tournais la tête pour me retrouver face à la grand-mère de Jude, en maillot de bain deux pièces. Vision d'horreur. « T'es trop sex Mamie ! Tu vas en faire craquer au camping ! » Oui bon, je n'avais pas osé lui briser son petit coeur tout fragile de vieille personne .. Bref, le plus important était arrivé quelque minute après. Ou plutôt, la plus importante. En effet, alors que je tournais la tête vers le chemin passant devant les tentes, mon regard se posait devant une magnifique silhouette. Une jolie blonde, avec des yeux magnifiques, un teint de poupée et un corps à faire damner un saint. Pour le coup, je crois que si Jude serait arrivé, elle m'aurait retrouvé captiver par cette jolie demoiselle. Plus tard, j'ai appris l'identité de cette fille ; Adame. Il se trouvait qu'elle avait une soeur, jumelle en plus. Et, pourtant, après l'avoir contemplé pendant de longues minutes sans fin tel un psychopathe, j'avais réussi à la différencier de sa soeur dès le premier soir grâce à la gourmette fine en or accrochée à son bras. Adame, Maddie, Jude et moi, nous nous étions très vite bien entendu. Au point de former une jolie petite bande de grands copains. Mais, pour ma part, je m'étais surtout rapproché d'Adame, pour ainsi former un petit couple tout mignon avec elle. En deux semaines, j'avais connu le plus grand des bonheurs en sa compagnie. Et puis, au retour des vacances, la situation s'est dégradée. J'étais bien trop jaloux pour supporter une relation à distance, chose qui a fait qu'Adame décide que notre histoire devait prendre fin. J'avais respecté sa décision. Enfin, j'étais surtout bien trop entêté pour vouloir faire le premier pas afin de recoller les morceaux.
chapitre 4 + Cela faisait deux mois, deux mois que Jude n'avait plus remis les pieds en classe. Deux mois qu'elle n'allait pas bien, qu'elle donnait du souci à sa grand-mère. Deux mois qu'elle ne voulait pas me voir aussi et, ça, c'était ce qui faisait le plus mal. Je passais tous les soirs chez sa grand-mère, dans l'espoir qu'elle accepte de me voir. Mais rien n'y faisait, elle refusait à chaque fois, verrouillant sa porte de chambre pour que je ne puisse pas entrer. Et puis, j'en avais eu marre. En sortant des cours un vendredi après-midi, j'avais pris la direction de sa maison. Sachant pertinemment qu'elle n'ouvrirait pas la porte, j'avais escaladé le mur pour arriver sur le toit, devant sa fenêtre. Elle était sur son lit, pleurant encore. Et moi, j'avais un pincement au coeur en la voyant ainsi. Je toquais à la vitre et, j'imagine qu'avec la conscience du danger que je prenais, Jude me faisait entrer. Sans oublier de me jeter un regard de reproche, bien évidemment. On était restés là, pendant quelques minutes, dans le silence. Elle, sur son lit. Moi, sur la chaise de son bureau. « Bon, y en a marre Jude. On s'inquiète pour toi, il faut que tu t'bouges. » « C'est facile à dire pour toi, tu l'as pas perdu Matty ! Tu sais pas ce que j'ressens ! » Eh bam, dans ma gueule. Il était clair que je ne savais pas ce que c'était de perdre quelqu'un pour toujours, étant donné que je n'avais pas eu à vivre cela. Pourtant, je savais ce que c'était que de laisser la personne qu'on aime partir. Je me levais, puis je me mettais accroupis devant ma meilleure amie. « Non, j'sais pas, c'est vrai. Mais toi, tu savais pas ce que c'était que de se faire battre et tu m'as aidé. T'as réussi à me faire aller mieux Jude. » Je lui disais tout cela en lui prenant les mains dans les miennes. « Alors, laisse-moi t'aider, bébé. Ça me détruit de te voir comme ça .. » Continuais-je en la regardant dans les yeux. « Et puis, t'avais dit qu'on serait toujours là l'un pour l'autre, qu'on serait toujours ensemble. Tu peux pas me laisser tout seul, j'ai besoin de toi. » Finissais-je par lâcher. Si j'étais bien sûr d'une chose, c'est que sans Jude, j'aurai du mal à avancer. Elle était bien trop importante pour moi. « Je .. Je l'ai perdu Matty .. » Avait-elle dit en douceur, la voix nouée par les émotions qui la submergée. « Me laisse pas toi aussi .. » Ajoutait-elle avant de passer ses bras autour de mon cou et de me serrer fort contre elle, laissant ensuite ses larmes coulaient au creux de mon cou. Cela faisait deux mois qu'elle ne s'était pas laissé aller dans mes bras et, maintenant qu'elle le faisait, je me sentais bien mieux. Ça n'allait pas être facile, mais j'allai faire en sorte qu'elle aille bien. Qu'elle ne souffre plus d'une perte aussi brutale.
Au fil du temps, Jude avait repris le goût de vivre et ça me faisait vraiment plaisir. Cependant, sa grand-mère, elle, n’allait pas au mieux de sa force. Elle avait été touchée par l’Alzheimer. C’était très dur pour ma meilleure amie, mais aussi pour moi. Ne pas être reconnu par la seule grand-mère qu’on est connu dans toute sa vie, c’est très dur à vivre. Jude avait vite évoqué le fait d’aller faire hospitaliser sa grand-mère à Londres, dans un hôpital adapté pour ce genre de maladie et qui serait parfait pour elle. Naturellement, avec ma mère, nous étions du voyage. Après tout, depuis plusieurs années, nous formions une famille recomposée tous les quatre. On n’abandonne pas les membres de sa famille, on s’y accroche jusqu’au bout, coûte que coûte. Ma mère avait réussi à se faire muter pour le boulot à Londres. Jude et moi, nous nous étions inscrits sans difficulté pour nos troisièmes années d’études. Et c’est ainsi que nous étions tous partis pour une nouvelle vie dans la capitale anglaise.